“Le tentateur s’approche et il dit à Jésus : “Si tu es le fils de Dieu…”
Évangile selon saint Matthieu 4, 3
La question porte au cœur, elle met en cause son identité. La mise à l’épreuve est la base de la manipulation… « Si tu es spirituel(le), dévoile-moi ton âme », « si tu es généreux, prouve-le », « si tu veux tout donner, laisse-toi guider »… Avec la révélation des scandales dans l’Église, nous avons découvert l’existence de l’emprise. Peut-il vraiment y avoir des directeurs de conscience, des directeurs spirituels ? Ces expressions ne sont-elles pas contradictoires dans leurs termes ? Sérieusement, qui peut prétendre jouer ce rôle ?
Le cléricalisme dénoncé constamment par le pape François est une tentation, non seulement pour les abuseurs, mais aussi pour chacun : il est tellement facile de se laisser convaincre d’abandonner son discernement, de renoncer à choisir soi-même, de se confier à un autre pour ses choix essentiels. Il est tellement rassurant de suivre quelqu’un qui sait ce qui est bien pour vous, quelqu’un qui vous dit ce qu’il faut faire, qui sait ce qui est la « volonté de Dieu » ! Il est tellement difficile de dire « non ! », « arrière, Satan ! ».
Le tentateur fait souvent partie de nos proches. Pierre en est un pour Jésus. Il propose l’identité du messie triomphant au lieu de celle du messie souffrant. À lui aussi, Jésus dit « arrière, Satan ! ». Cette imposture n’est-elle pas plus grave encore que le reniement ? Est-elle définitivement conjurée ?
Le petit enfant commence par dire « non » et c’est ainsi progressivement qu’il apprend à dire « je ». La vie n’est pas de rester dans une matrice tiède où baignent des clones indifférenciés. L’uniformité est le contraire de l’unité. L’appel à l’humilité peut être suspect. Les dominants ont intérêt à voir les autres régresser.
Il faut apprendre à dire « je », et à l’affirmer, que cela plaise ou non. Je suis, et je serai. « Moi, je suis, ego eimi ! » C’est ainsi que Jésus se présente au groupe de soldats qui viennent l’arrêter. C’est ainsi que Dieu révèle son nom à Moïse dans le buisson ardent. Puisque tu es fils ou fille de Dieu, tu es appelé à dire toi aussi « je ». La tentation serait d’y renoncer. « Je suis », « je veux » est la condition pour dire, comme saint Pierre à la résurrection, « je t’aime ».
Illustration : Anvers - Fresque de la Tentation de Jésus à Joriskerk
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À vous la parole
60 commentaires
Rédiger un commentaire« Belle réflexion sur la nécessité d'être responsable et de grandir en maturité spirituelle.
Lire la suiteCertes, nos discernements spirituelles importants se font presque toujours à l'aide de autres, mais nous som... »
Benoit Séguin - 23 février 2024 - 16:12
« Bravo Madame.
Lire la suiteJ'aime beaucoup votre méditation et elle me conforte complètement dans ma conviction de penser par moi même.
»
Mado - 19 février 2024 - 12:34
« Je rajoute un commentaire qui à trait à certaines réponses.
Lire la suiteY a-t-il une personne qui fasse de la modération dans cet espace d'échanges ?
Étant Social Manager sur un autre site, je peut témoigner que ... »
Stéphanie - 19 février 2024 - 10:59
« Je ne pense pas que le temps de Carême ait à être un temps de propagande de tél ou tél courant ou conception de l'église. Remettre en cause par exemple la notion de directeur de conscience, est certes... »
Lire la suiteMarcauguste - 19 février 2024 - 9:53
« Merci pour ces propos révolutionnaires qui font tant de bien. Quel beau message que votre exhortation à aller de l'avant, à s'affirmer et à refuser la soumission et l'uniformité qui mènent à la désint... »
Lire la suiteGabrielle Bunlon - 19 février 2024 - 3:14
« Merci pour cette belle méditation.
Lire la suiteIl y a bien des années j'avais " une amie" qui sollicitait sans arrêt ma présence, dès qu'elle me téléphonait j'accourais. Au bout de quelques années cela me devena... »
monette - 18 février 2024 - 21:38